J'ai commenc ce livre il y a un peu plus de vingt ans. Je l'ai abandonn et l'ai repris plusieurs reprises. L'id e d' crire quelque chose sur Marcel Duchamp m'obs dait mais je n'ai pas su pendant longtemps quelle forme cela devait prendre. Je commen ais un chapitre, le jetais au rancart, l'envisageais sous un autre angle, et mes notes se seraient accumul es sans fin si je n'avais eu un jour l'id e d'y introduire des l ments personnels, quasi autobiographiques, ce dont je m' tais toujours abstenu dans mes romans. Mon point de d part tait une lettre que l'artiste avait crite son ami Henri-Pierre Roch , le 27 mai 1942, du Maroc. Il fuyait alors l'occupation allemande et venait d' tre intern dans un camp de transit, A n Sebaa, dans les envions de Casablanca. '' videmment, crivait-il, le camp d'h bergement est une horreur (pas de lit et une salle commune avec paillasses, hommes et femmes, une centaine), mais j'ai r ussi chapper cela.'' Il ajoutait: ''Je couche seul dans une salle de bains, tr s confortable, 7 kilom tres de Casa au bord de la mer.'' Mon projet a commenc prendre forme lorsque je lui ai adjoint une narratrice, l'arri re-petite-fille des propri taires de la salle de bains o Duchamp avait trouv refuge, et un universitaire que ses recherches avaient lanc sur les traces de l'artiste. L'une habitait Tel-Aviv o avaient migr ses parents, l'autre, Fran ais expatri , enseignait l'Universit du Colorado: il n'appartenait qu' Duchamp de les r unir. Orchid e fixe (calembour emprunt aux notes l'artiste) est ainsi l'histoire d'une double rencontre, d'une double passion, et de milieux et d' poques qui se croisent dans une longue suite de causes et d'effets. Serge Bramly